« Si j’annonce l’évangile, je n’ai pas à en tirer orgueil, c’est une nécessité qui s’impose à moi. Malheur à moi si je n’annonce pas l’évangile ».
Cette dernière affirmation quasi proverbiale de saint Paul pourrait et devrait être la devise de tous ceux qui sont un peu conscients de leur identité chrétienne. Le vrai disciple du Christ, celui qui est digne de porter le nom de chrétien c’est celui qui essaye par tous les moyens qui lui sont possibles d’annoncer autour de lui la bonne nouvelle du salut. Il doit évidemment être convaincu qu’il a une bonne nouvelle à communiquer. Saint Paul, lui, en était absolument convaincu : « libre à l’égard de tous, je me suis fait le serviteur de tous afin d’en gagner le plus grand nombre possible ». Dans l’évangile selon saint Marc que nous avons entendu aujourd’hui, nous trouvons la même conviction qui anime Jésus et dont saint Paul est imbibé, imprégné au plus profond de lui-même : nous y voyons Jésus parcourir villes et villages en train de guérir tous ceux qu’on lui présente, tous les malades atteints de toute sorte de maladies physiques et psychiques, aussi bien que la belle-mère de Pierre atteinte de fièvre.
L’évangile que nous venons d’entendre fait partie d’un vaste ensemble qu’on appelle « discours d’adieu », un discours qui a été prononcé par Jésus à la veille de sa passion, le jeudi saint jour de la dernière Cène, sachant bien tout ce qui l’attendait. Il s’adresse à ses disciples qu’il veut rassurer à l’approche de sa mort violente qui pourrait les ébranler, eux qui ont vécu avec lui quelques années inoubliables, ils se sont attachés à lui et Jésus ne voudrait pas que tout cette riche expérience vécue ensemble, accompagnée d’un enseignement solide, s’envole en fumée. Dans ce discours, Jésus livre ses volontés, ses convictions les plus fortes comme on le fait dans un testament.
En ces jours tristes et pénibles, douloureux même pour certains d’entre nous, tous obligés de suspendre toute vie associative et même une grande part de la vie sociale – je pense aux déplacements et aux loisirs, sans parler des messes qui nous rassemblent tous les dimanches en cette chapelle – et tout cela à cause de ce sacré virus qui se transmet d’homme à homme, nous écoutons ce merveilleux récit des deux Pèlerins d’Emmaüs avec d’autant plus d’intérêt que, eux aussi ils ont quitté la ville de Jérusalem où l’on fêtait la Pâque juive dans un état très dépressif, peut-être plus avancé que le nôtre : ils s’en retournent fort désabusés de ce qui est arrivé à Jésus de Nazareth, cet homme dans lequel ils avaient mis tous leurs espoirs pour la libération de leur nation Israël. Et bien cet homme, ils l’ont arrêté et ils l’ont mis à mort en le crucifiant. Ils, ce sont leurs autorités religieuses autant que politiques. Tous leurs espoirs se sont effondrés. Nous écouterons ce récit avec d’autant plus d’intérêt, disais-je, que leur peine, leur désolation s’est transformée en une consolation joyeuse. Essayons de comprendre comment a bien pu se passer ce complet renversement. Peut-être pourrions-nous en retenir la recette ? C’est ce que je vous souhaite.